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    Publié dans Le Soir d'Algérie le 05 - 06 - 2012

    Théniet-El-Had Zone III Wilaya IV Modèle. Malgré la torture, les arrestations massives, les «corvées de bois» où des prisonniers sont passés de vie à trépas, une balle dans le dos. Malgré la situation précaire dans laquelle vivaient les maquisards où le manque d'armement, de munitions, d'habillement et de quoi s'alimenter se faisait ressentir d'une manière cruciale alors qu'en face les militaires français, forts par leur nombre, bénéficiaient de l'arsenal de l'Otan et mangeaient à leur faim, l'ALN donnait toujours, durant cette fin de printemps 1957, du fil à retordre [1] aux troupes du colonel De Schacken, chef du Secteur militaire de Téniet-El-Had. Durant cette même période, deux batailles furent engagées : l'une au lieudit Matmar- Lahmar [2] entre le 14e Dragon et la Katiba El Hassania qui réussit l'exploit d'abattre un avion T6 et se replier sur Amrouna, laissant le commandant Audrey, l'un des adjoints de De Schacken, écumant de rage. L'autre bataille eut lieu au mois de mai 1957 au lieudit Sidi-Bakhti, dans le 1er Secteur FLN/ALN, où un bataillon de l'ALN fut accroché par 140 Bérets noirs à l'issue de laquelle 4 militaires français ont été fait prisonniers dont un officier et 30 Bérets noirs éliminés. A la suite de ces cuisantes défaites qui n'ont pas été digérées par le colonel De Schacken, une importante opération de recherche eut lieu quelques mois après où le 11e Partisan, le groupement nomade de Théniet-El-Had, le régiment du 14e Dragon et le 5e Chasseur, véritable tête chercheuse de l'aviation, ont accroché la Katiba El Hassania soutenue par le fameux commando zonal «Si Djamel» à Amrouna. Les pertes ont été sérieuses dans l'un comme dans l'autre camp. Malgré le nombre de chouhada, le résultat de cette bataille fut une victoire plutôt psychologique pour les moudjahidine. En écoutant Cheikh Bouras chanter les déportés à Cayenne Pour répondre aux militaires français, le chef de Région FLN/ALN de Ghilès prit la décision d'entreprendre une action kamikaze de très haute importance avec à la clef un retentissant impact psychologique. Il fut décidé le mitraillage du centre-ville de Théniet- El-Had. C'est une façon de dire aux Français qu'à Théniet-El-Had, la Révolution avait le don de ressusciter. Elle est présente là où on s'attend le moins. Nous sommes le 2 juin 1957, c'était une matinée relativement chaude d'un dimanche, jour de marché hebdomadaire. Les commerçants ambulants emplissent petit à petit le boulevard de Taza et la rue Margueritte de leurs étalages aux mille couleurs. Au café Timouli, les paysans préfèrent les nattes en alfa aux bancs branlants pour s'asseoir en demi-cercle autour d'un thé en écoutant religieusement la mélancolique chanson de Cheikh Abdelkader Bouras chantant les nationalistes algériens déportés à Cayenne. Les discussions se perdent quelquefois dans les méandres des «on-dit» relatifs à la fameuse bataille de Sidi-Bakhti à Amrouna qui vient d'être terminée. En l'espace d'une journée, le boulevard de Taza, dans toute sa longueur, devient un grand souk. Le centre-ville est pris d'assaut par les colons et des militaires en permission, attablés à la terrasse du bar Rosfolder et Solbès. De jeunes Européens déambulent en groupes le long du boulevard, d'autres adossés à la murette du jardin public attendent l'ouverture du foyer rural. Une patrouille de militaires, à leur tête Zerigui au regard anesthésiant, arpente lentement le trottoir, précédée par le half-track. Elle passe devant Gérard Pastou, élément de la Garde territoriale, adossé au mur de la mairie, mitraillette en bandoulière. Une voiture blanche de marque Vedette ayant à son bord trois personnes descend à vitesse modérée le boulevard. Elle croise le half-track au niveau du monument aux morts. La voiture appartenait au caïd Berradja, originaire de Taza, et était souvent conduite par son fils Ahmed qui habitait Théniet- El-Had. Mais ce jour-là, elle a failli être arrêtée par l'officier de police communale, Daguenet, qui semblait avoir des doutes sur la mine des passagers. A la dernière seconde, il se ravisa et continua son chemin. Il s'est peut-être dit que les occupants sont des parents du caïd. En arrivant à hauteur du CFAT [3], la voiture s'emballa, le moteur rugit et le bolide fonça à toute berzingue vers le centre-ville. Un moment après, plusieurs rafales de mitraillette déchirèrent le silence de cette matinée dominicale, sortant de leur léthargie les endimanchés du bar Rosfolder. Flash-back Haouch Nouar s'est réveillé tôt le matin juste après la levée du couvre-feu pour libérer ses occupants. Si ce n'était sa cour intérieure admirablement fleurie par tout le voisinage, Haouch Nouar ressemble, à partir de dix-huit heures, à une grande prison qui enferme dans sa douce fraternité ses pensionnaires. Le matin de cette journée, Ahmed, fils aîné du caïd Berradja Bouaâbdela, s'apprêtait à faire démarrer sa voiture-taxi, de marque Vedette, aux formes arrondies, pour entamer cette radieuse journée prometteuse car jour de marché hebdomadaire. La tête sous le capot, il répondit négligemment à un énième «salam-âliekoum» anonyme. Mais la personne qui l'a salué reste debout devant la voiture. Ahmed leva doucement la tête vers l'inconnu qui lui sourit. «Ce sera pour une course-taxi jusqu'à Taza, ya Si Ahmed.» Ahmed se redressa et c'est à ce moment-là qu'il s'aperçoit de la présence, un peu en retrait, de deux autres inconnus. La «kachabia» de l'un d'eux dissimulait mal sa Mat 49. Ahmed comprit tout de suite qu'il s'agissait de maquisards venant sûrement du maquis de Sidi-Daoud, car au-delà de Haouch Nouar, c'était la rase campagne de Ghilès. Aussi, Ahmed a eu plusieurs fois l'occasion de faire de telles rencontres, ce qui explique son sang-froid. Nous sommes des «fidayîn» ALN. Nous ne vous ferons aucun mal si vous nous suivez. Nous avons uniquement besoin de votre voiture. Pas de geste inconsidéré, disait gravement l'un d'eux. Pris au dépourvu, cela ne l'a pas empêché d'être sclérosé par une peur qui l'envahit soudainement. Ahmed et Bouabdellah, son père, sont pourtant des soutiens sans faille à la Révolution. Ils ont de tout temps répondu aux attentes de l'ALN. Rares étaient les caïds de la région qui étaient des suppôts de l'armée française. C'étaient plutôt des fonctionnaires rattachés aux diverses administrations (tribunal, services communaux, commune mixte) comme ce fut le cas des caïds Khebizi Ahmed et Messabis. Quelques-uns avaient en charge l'administration des douars (caïd Berradja) chez qui les moudjahidine trouvaient le gîte et le couvert. D'autres, par contre, étaient carrément acquis au service des S.A.S. de l'armée coloniale, dont le plus connu était le bachagha Zitouni. Quelques minutes plus tard, la voiture démarra en direction de Taza, avec au volant Ahmed. Il est sept heures du matin. Arrivée à mi-chemin de Taza, la Vedette blanche longea un oued encaissé au fond d'un val. Elle est maintenant à l'abri des soldats de la guérite qui se trouve sur un piton dominant une agglomération. La voiture s'immobilisa et, pour ne pas compromettre son propriétaire, on se mit d'accord pour le ligoter, le bâillonner et l'installer dans le coffre de la voiture. L'un des maquisards prend le volant et fait demi-tour. Comme pour faire d'une pierre deux coups, ils s'arrêtèrent dans leur course effrénée, en retrait de la ferme Fernand Guéri entre Théniet-El-Had et Trolard Taza, incendièrent la remise et une aile d'habitation. C'était une occasion rêvée pour éliminer le propriétaire, Guéri, qui a toujours manifesté ses sentiments de haine contre l'Arabe et qui traitait les saisonniers indigènes travaillant dans ses champs d'une manière inhumaine. Fernand préférait fouetter à mort un employé indigène de sa ferme [4] que de donner le fouet à une bête de somme. Mais, ce jour-là, Fernand était absent. Après avoir incendié la ferme, ils prennent la direction de Théniet-El-Had, où ils arrivèrent à neuf heures au col surplombant le village. Ce jour-là, Gaston Formonto donnait une réception dans son restaurant à l'occasion du mariage de sa fille Arlette avec le jeune Galbès. Cette réception précéda un buffet dansant qui devait avoir lieu au foyer rural. Aujourd'hui, Gaston a invité tous les intimes pour une réception dans son établissement. La fête bat son plein au bar-restaurant. Le champagne coule à flots, les filles étaient belles, surtout Paulette Esposito, qui, à chaque occasion, ne manquait pas d'occuper le podium de la beauté tout en faisant les yeux doux à son petit ami Francis. Le père de Paulette était un artiste-peintre, mais il avait l'âme d'un tueur. Les jeunes ne se sont pas privés de tcha-tcha-tcha et d'un twist effréné sous le regard amusé des parents qui attendent l'ouverture du buffet froid. Ils réservent leur énergie pour de langoureuses valses durant cet après-midi. Une musique douce, tendre et quelquefois bruyante envahit la rue Margueritte et le centre-ville. C'était l'insouciance, le bien-être et l'abondance de biens. Et le village nègre regarde d'en haut, les yeux tristes, la manifestation de l'opulence, la somptuosité et la douceur feutrée dans lesquelles vivent les Français. Il est dix heures quarante-cinq. Sitôt arrivée à hauteur de la banque, la Vedette s'emballa, le moteur rugit, impitoyablement malmené, les roues labourent l'asphalte et la voiture prend de la vitesse. Un canon de mitraillette Mat 49 sort subitement de la vitre arrière et lâche une rafale atteignant le jeune et non moins cruel Gérard Pastou qui venait tout juste de traverser le boulevard après avoir pris son verre de champagne chez Formento. Gérard était un membre des plus virulents des Territoriaux et était tout le temps armé de sa mitraillette Sten. Ce jour, il était en faction devant le siège de la mairie. C'était son tour de garde. Il ne résista pas à l'envie d'aller au bar pour apaiser le «creux de dix heures» avec de la kémia qu'il poussa avec du champagne Moëtt Et Chandon. Il sortit avec regret pour se poster en face du barrestaurant. C'est là qu'il reçut une flopée de balles qui le plièrent en deux. L'autre moudjahid lâcha à son tour une rafale qui, malheureusement, fit un blessé indigène. Le «stacato» des armes fit sortir les invités de chez Formento. Le carrefour s'emplit de colons alors que les quelques Arabes qui déambulaient dans les parages s'éclipsèrent dans les dédales des venelles. La nouvelle s'est répandue dans le souk. Les magasins sont vite fermés dans un vacarme de bruit de portes malmenées. «L'essentiel pour nous était d'installer la terreur dans le camp ennemi» La rue Margueritte est devenue déserte en un temps record. C'était impressionnant de voir une rue déserte alors que dix minutes auparavant elle était noire de monde. La foule désorientée et tumultueuse s'était enfuie à travers les rues Sidi- Ferruch et Mexico et de là vers le village nègre où les fuyards avaient la chance de ne pas se faire prendre. Les portes s'ouvraient et se fermaient précipitamment sur les fuyards. Ceux qui n'avaient aucune possibilité de se cacher se collaient aux murs, tétanisés par la peur d'être pris. En entendant la rafale de mitraillette, Solbès sortit de son magasin et interrogea d'un regard hypnotisé, André Pastou, son voisin d'en face au seuil de son bazar. Il fut surpris soudainement par une marée humaine qui courait éperdument venant du centre-ville à la recherche d'un abri. En appréhendant l'intervention de la patrouille territoriale, il ouvrit largement le portail donnant accès à la cour, derrière le magasin et invita précipitamment la foule bigarrée à y entrer. La Vedette est maintenant au niveau du bar Marty. Au premier claquement des balles, Nicole le bossu sortit du garage de son frère, pistolet en main. Le centre-ville s'emplit de colons l'air belliqueux. Les uns criaient des ordres confus, les autres réclamaient une ambulance ou une voiture pour le blessé. L'attentat aurait dû être beaucoup plus meurtrier qu'il ne l'a été. Dans la confusion qui a suivi l'attentat, Djillali Triki, qui tenait un magasin en face de la Mairie, s'apprêtait furtivement à s'enfermer dans son magasin quand un colon fait irruption, arme au poing, un rictus lui barrait affreusement le visage déformé par la haine. Et, sans état d'âme, déchargea son pistolet à bout portant sur le malheureux Djillali qui s'affala derrière la porte. Une automitrailleuse prit en chasse la Vedette qui, suivant un plan bien précis et préalablement étudié, s'engagea dans la piste de «Hazouta» où elle fut abandonnée en haut d'un piton surplombant Amrouna, fief de la Zone III de la Wilaya IV. Le tireur de l'automitrailleuse eut le réflexe, pour parer à toute éventualité, de tirer une rafale de sa mitrailleuse 12/7 sur la voiture à l'arrêt. On découvrit après mille précautions d'approche, le cadavre du malheureux Ahmed gisant dans une mare de sang, atteint de plusieurs balles, le visage déchiqueté. Les trois moudjahidine étaient déjà loin, absorbés par la dense végétation des monts d'Amroun. Le lieutenant-chef de Région s'attendait à un carnage car d'après les agents de liaison, tous les dimanches, en milieu de matinée, la placette de la mairie ne désemplissait pas. Mais ce jour-là beaucoup de colons faisaient la fête à l'intérieur du bar-restaurant. Sauf Gérard Pastou. «L'essentiel pour nous était d'installer la terreur dans le camp ennemi, de ne leur laisser aucun moment de répit. L'attentat en lui-même et les autres actions du «fida» perpétrés à Théniet- El-Had [5] laissèrent un impact psychologique sur l'ennemi, déjà qu'à la suite de cet attentat à la Vedette nous pûmes éliminer un des plus virulents des Territoriaux, c'était une écrasante victoire morale», me disait, en 1980, Hadj Boutouchent Cheboub, militant et moudjahid de la première heure. Dans la guérilla, la victoire d'une action n'est pas nécessairement dans le nombre de tués ou dans la conquête d'un territoire. Le pouvait-on ? Elle réside dans l'impact psychologique qu'elle engendre. Les grenades utilisées lors des attentats commis à Théniet-El-Had dataient de la dernière guerre. La plupart de ces engins étaient des pétards qui avaient pour but essentiel de mettre dans la tête des Français l'omniprésence de ceux qui sont déterminés à arracher leur liberté au prix du sang. Les emmener à penser dans leur intime conviction que tôt au tard l'indépendance de l'Algérie sera le seul but de la Révolution et ceci quel que soit le matériel de guerre employé ou le nombre de militaires ennemis engagés sur le terrain. 1957 a été l'année à partir de laquelle Téniet-El-Had connut une recrudescence d'attentats à la grenade. Des vagues d'arrestations s'ensuivirent. Plusieurs civils furent arrêtés et emmenés à Aïn Sfa, à Tissemsilt ou à la caserne-forteresse de Théniet-El-Had, où ils furent atrocement torturés. Plusieurs d'entre eux furent assassinés. La phobie des «actes terroristes» s'installa alors dans le camp français. Les portes et les fenêtres des villas du «Filedj Djedid» [6] furent grossièrement grillagées. On se retourne toujours en croisant dans la rue un indigène. Des treillis de fil de fer barbelé firent leur apparition séparant le centre-ville du reste des quartiers indigènes. La chasse à l'indigène s'intensifia. La peur entra dans la ville et a envahi les deux camps. Jusqu'à justice soit faite. Elle le sera en 1962. M.-R. Y. retraité, fils de chahid [1] «Le torrent et la digue» du général Massu. [2] Lieudit (Silo rouge). [3] Crédit foncier d'Algérie et de Tunisie. [4] Il s'agit de cheikh Bouziane qui a été fouetté presque à mort par Fernand Guéry pour avoir suspendu sa veste à une pièce de la moissonneuse qui a cassé (la pièce était déjà abîmée). Cette histoire nous a été rapportée par Abderrahmane Rezzoug. [5] Quatorze attentats au total. [6] Quartier européen.


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    Théniet El-Had - 1961

    Mohamed Rachid YAHIAOUI Publié dans Liberté  le 15 - 07 - 2012


    Octobre 1961. 9 heures. La placette de la mosquée Cheikh Mohamed-Ben-Ahmed est éclairée par un soleil aux timides apparitions. Le ciel, ce matin-là, est clairsemé de nuages incohérents qui, effilochés par un vent automnal, laissent passer par intermittence des rayons de soleil têtus et opiniâtres, par moments pâles et incertains.
    Profitant de ce froid soleil, quelques bûcherons sont venus, tôt ce matin, proposer leurs fagots de bois exposés sur la placette. D'autres sont descendus tout simplement du "Village nègre" [1] fuyant leur taudis. Ils viennent réchauffer leurs membres engourdis par le froid, sous un tiède soleil endeuillé. La placette sert aussi de lieu de recrutement pour colons, qui trouvent une main-d'œuvre corvéable à merci.
    En attendant une hypothétique embauche journalière, les hommes et les enfants du Village nègre se dorent au soleil comme des iguanes. Ils descendent tous les jours à la placette pour oublier un peu l'incommodité de leurs gourbis et la énième nuit froide qu'ils viennent de passer sous l'unique "hanebel" [2] humide.
    11 heures. Deux chars et une automitrailleuse traversent la placette à toute berzingue, suivis par des GMC pleins de militaires. Les camions s'arrêtèrent brutalement devant l'entrée du village indigène. Un capitaine hurla des ordres qui seront répercutés par des sous-officiers. Les soldats commencent alors à envahir les ruelles boueuses dans un bruit cadencé de rangers et de cliquetis de culasses qu'on malmène.
    En empruntant la route des Cimetières, les blindés se sont positionnés en haut du village.
    Mystère
    Il est maintenant 13 heures, en ce début d'après-midi d'octobre 1961. Une foule aérée de curieux est éparpillée de part et d'autre de l'entrée du Village nègre, côté boulevard de Taza . Le quartier est bouclé par les militaires depuis 10 heures. On chuchote. On s'interroge du regard. Tous appréhendent un malheur. La peur pour la sécurité des leurs se lit sur tous les visages. Généralement, quand il y a une rafle, il n'y a pas autant de militaires qu'aujourd'hui. La rafle fonctionne comme un clapet de non-retour. Dès que les gens sont dedans, ils ne peuvent ressortir qu'après avoir été malmenés, pressés de questions qui sont accompagnées de coups de godasse et de gifles.
    Quelques informations hachurées, contradictoires, quelquefois sans fondement, biscornues, viennent quelque peu satisfaire la curiosité des uns et tranquilliser les autres. Mais, aujourd'hui, c'est le grand branle-bas de combat.
    13 heures. Soudain, des rafales de mitrailleuse 30 et 12/7 déchirent le silence, auxquelles répondent des rafales de Mat 49 et des tirs espacés de Masse 36. Le pot de fer contre le pot de terre. Les tirs de mitrailleuses s'arrêtent subitement. Seuls les staccatos des pistolets-mitrailleurs se font entendre par tirs sporadiques.
    Puis, une série d'explosions secouent les murs de terre des gourbis. Une épaisse fumée s'élève et enveloppe les masures avoisinantes. Un silence de cathédrale s'installe dans la foule des villageois.
    Une heure après, le quadrillage se desserre, deux chars descendent le boulevard de Taza . Sur l'un d'eux sont attachés trois cadavres en treillis. Ce sont des moudjahidine qu'on vient d'abattre au canon 120 mm.
    Flash-back
    Mohamed K.E.M. habite le Village nègre, quartier indigène où se disputent promiscuité, saleté des ruelles et maladies dans une repoussante précarité. C'est un enchevêtrement de gourbis faits de chaume et de tôle. Le quartier s'est dangereusement agrandi après l'opération de regroupement des populations rurales.
    Mohamed est un ancien combattant et un grand mutilé de la guerre d'Indochine. Sa maison, d'une relative habitabilité, construite sommairement en pierre et toit de tuiles romaines, est constituée de deux chambres, dont l'une fait office de cuisine et de salle de séjour. À son retour d'Indochine, Mohamed, croyant bénéficier de l'avantage que lui ouvre son statut d'ancien combattant, adresse plusieurs demandes pour bénéficier d'un logement à la cité musulmane qu'on vient d'inaugurer à la faveur du plan de Constantine . Mais, l'administration l'ignore superbement. Il est revenu chez lui en 1954, après la débâcle de Dien Bien Phu, avec un pied en moins. Ne mérite-il pas un minuscule deux-pièces ? Le 2e Bureau a-t-il des doutes sur le comportement de Mohamed ? Donc, par dépit pour ce mépris et cette indifférence, Mohamed entre de plain-pied dans l'OCFLN, en devenant collecteur d'effets vestimentaires, de cotisations et de médicaments. Son frère Ahmed n'hésite pas une seconde pour franchir allègrement la barrière et se retrouve un beau jour dans le camp ennemi, au sein de la section SAS de Théniet El-Had. Ahmed, suppôt de l'armée française, habite avec sa femme à la cité musulmane.
    À l'insu d'Ahmed, qui vient régulièrement rendre visite à sa mère, la maison de Mohamed est devenue un refuge pour les moudjahidine de passage. Une sorte de relais où ces derniers peuvent trouver gîte et couvert.
    Au début du mois d'octobre 1961, Ahmed bénéficie d'une permission qu'il s'apprête à passer auprès de sa mère, au Village nègre. Sans crier gare, il pénétre en cet après-midi du 6 Octobre, à 08 heures, dans la cour de la maison, créant la surprise générale. En le voyant, le sang de sa mère ne fait qu'un tour, car quatre moudjahidine sont chez elle depuis quatre jours.
    Une peur bleue s'empare de la pauvre femme, car craignant le pire pour son autre fils.
    "Il ne faut pas rester une minute de plus. Il faut que tu partes. Nous avons des invités." Pressée de questions par son fils, la mère n'a d'autre choix que de dévoiler l'identité des quatre invités.
    Toute tremblante, elle prie son fils de garder le silence.
    - Il y va de notre sécurité, lui dit-elle.
    Entre temps, un des maquisards [3] s'impatiente et ne tient plus en place. Il supplie ses camarades de partir. "Nous avons trop abusé de la bonté de la femme et de Mohamed. Nous pouvons leur attirer des ennuis si nous restons encore longtemps", leur dit Si Lorabi.
    Devant la ferme décision de ses camarades de rester encore une journée, Si Lorabi prend la décision de les devancer. Il rassemble ses affaires et sort par une petite porte donnant accès directement au cimetière de Si Bendjelloul et, de là, il doit regagner le secteur de Ghilès.
    Les quatre maquisards sont arrivés quatre jours auparavant dans un état des plus lamentables. Les yeux hagards, luisants, laissant trahir un ventre creux, les visages envahis par des barbes de forçat. Ce sont des loques humaines. Au bout de trois jours, leur physionomie s'est radicalement transformée. Le visage bien rasé, les habits propres, ils s'apprêtent à prendre le départ pour Ghilès, mais le destin en a voulu autrement.
    Ahmed va directement aviser la gendarmerie de la présence de "rebelles" chez son frère.
    "Ils ont menacé de leurs armes mon frère et ma mère. Ils sont leurs otages", ment Ahmed dans l'intention de sauver les siens.
    À l'intérieur, les trois responsables de secteur, Mohamed Doghmane, commissaire politique, Djillali Lamartine, responsable des renseignements et liaisons et Abdelkader Chikhoune, responsable des renseignements du secteur de Ghilès, sont en train de trier des documents, de compter l'argent qu'ils doivent remettre au chef de secteur de Ghilès, quand soudain un tremblement de terre secoue le quartier. C'est le vrombissement de deux chars, munis chacun d'un canon de 120 mm et d'une automitrailleuse. Un haut-parleur intime l'ordre aux "rebelles" de libérer les otages et de sortir les mains sur la tête.
    Sentant la fin qui arrive, les trois compagnons commencent à brûler les documents et les billets de banque qu'ils ont sur eux.
    Maintenant qu'ils se savent perdus, ils s'entrelacent et s'embrassent. À l'unisson, ils récitent la profession de foi. L'un d'eux crie un galvanisant "Allah Ouakbar" qui fait trembler les murs. Ils sortent dans la cour et commencent à tirer sur les soldats jusqu'à épuisement des munitions.
    Voyant qu'il ne peut les avoir vivants, le capitaine donne des ordres aux chars de tirer simultanément des obus, faisant voler en éclats la masure avec leurs occupants. Même détruite, la maison fait peur aux soldats, qui avancent avec mille précautions vers le tas de gravâts fumants.
    On retire les corps disloqués, ensanglantés des moudjahidine, sous les regards médusés de vieilles femmes agglutinées tout au long du trajet que doit emprunter le char chargé de son trophée macabre. Les cadavres sont exhibés à travers toutes les ruelles. Ils seront par la suite enterrés dans une fosse commune au cimetière Sidi-Ahmed-Bendjelloul.
    Ce jour-là, le Village nègre signe d'une énième signature le livre d'or de la Révolution.
    (*) M.-R. Y.
    Fils de chahid, retraité
    [1] Bidonville en amont de la ville constitué
    de taudis où habitent les indigènes
    [2] Epaisse couverture faite à l'aide
    de métier à tisser.
    [3] Il s'agit de Lorabi "Chinoui"

     


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  • JUKEBOXpar Mohamed-Rachid Yahiaoui

     

     

     

    1958 en Wilaya IV. Le rouleau compresseur de l’opération «Courroie» avance inexorablement d’Ouest en Est, les pertes sont considérables dans les rangs de l’ALN.

    Plusieurs armes ont été, cette fois-ci, récupérées par l’armée française, des casemates découvertes, des infirmeries saccagées. La «bleuite» a fait des ravages en Wilaya III limitrophe de la IV. Malgré cela, la détermination d’aller de l’avant n’a jamais été remise en cause par ceux qui, dans le dénuement total, sont résolus à arracher l’indépendance. Pendant ce temps, les populations de Theniet El Had et ses alentours, surtout les douars d’El Meddad, vécurent dans leur chair les exactions commises par la soldatesque «mécanique» sous les ordres du cruel colonel Marie-Meunière de Schacken, un Alsacien ayant plutôt l’allure d’un SS, avec son éternel monocle qui lui valut le surnom de «colonel Bouaïne».

    Sorti de Saint Cyr en 1934, il marqua son passage aux Dragons Portés de Verdun et en Indochine avec le 5e Cuirassier. Il fut chargé, à son retour de Diên Biên Phu en 1954, du 2e Bureau relevant du BEL (Bureau d’études et liaisons) de la 2e Région militaire d’Alger. Ami intime du général Massu, de Schacken fut décoré de la Légion d’honneur et muté au secteur militaire de Théniet El Had au mois de juillet 1957, spécialement pour casser et écraser la révolution à Théniet El Had et ses environs. Depuis son arrivée à la tête du 12e  RCA(1), plusieurs ratissages sanguinaires eurent lieu dans les douars avoisinants. Il ne passe pas  un jour sans voir les half-tracks rentrer à Théniet El Had avec, dans la plupart des cas, des cadavres de civils attachés à l’avant des blindés qu’on prétendait être des moudjahidine ou des chefs de maquis.

    Des scènes pareilles avaient pour but de  terroriser davantage les populations indigènes et atténuer la peur viscérale des colons suscitée par les fantomatiques fellagas.La caserne de Théniet El Had est devenue un véritable laboratoire de «torturologie», après celle de Aïn Sfa  à Tissemsilt, où les meilleurs tortionnaires de la région exerçaient leurs spécialités en inventant de jour en jour les différents procédés utilisés pour arriver à bout de  «la question». «La goutte chinoise»(2) est un procédé suranné largement dépassé devant l’hélicoptère, la gégène(3). 

    L’écrasement des testicules ou les aiguilles plantées entre la chair et les ongles sont les autres moyens atroces pour soutirer le renseignement. Les résultats sont obtenus en moins de temps qu’il faut que lors de la pratique de «la goutte chinoise». Dans toute cette ambiance macabre, s’il y avait quelqu’un à qui l’ALN devrait  tordre le cou, c’était incontestablement le colonel Marie Meunière de Schacken. C’est ainsi que là où le maquis s’attendait le moins du monde, l’occasion s’était présentée un dimanche 14 novembre 1958. C’était un jour gris. Le soleil apparaissait par moment entre deux nuages poussés par une bise glaciale.

    Un groupe de moudjahidine, venant du djebel Ghilès pour se rendre au PC de la Zone III de Amrouna, s’était arrêté au douar Boussedi pour reprendre des forces. Les maquisards étaient là depuis très tôt le matin. Dix-sept heures trente minutes. Les «choufs» informent, par «téléphone arabe», les djounoud de  l’arrivée de deux voitures civiles et d’une jeep militaire qui suivait loin derrière. Apparemment, le cortège n’était pas sécurisé. Dans la minute qui suivit, le chef de groupe, de concert avec ses compagnons, décide de tenter une embuscade. Un branle-bas de combat a lieu. On décide à la hâte de repérer les endroits propices à même de réussir l’action.

    Il faut dire que la situation de la Zone III est des plus précaires. Le maquis  manquait de tout : munitions, vêtements, alimentation. Heureux était celui qui traînait une paire de pataugas usée jusqu’à la corde. Dans certaines régions de la Wilaya IV, les maquisards enterrèrent leurs armes faute de munitions. Les  bases de l’Est et de l’Ouest étaient loin, et on peinait à approvisionner en armes la Wilaya. «Notre usine d’armement était les routes où on tendait des embuscades en espérant récupérer ainsi vêtements et armes.» (dixit commandant Azzedine)(4).

    L’année 1958 avait marqué  au fer rouge certaines régions de la Wilaya IV. «Un demi-oignon et une demi galette rassis étaient notre caviar pour tromper notre faim.» (dixit commandant Azzedine). Le groupe de maquisard était donc acculé à tenter le diable pour réussir cette embuscade inespérée. Personne, même le «chouf», n’avait idée de l’aubaine qui se présentait ce jour-là. Un jour qui a fait de cette embuscade et des hommes qui l’ont tendue un allant décisif vers davantage de courage et d’abnégation pour concrétiser les aspirations de Novembre. 

    Caché par quelques nuages qui s’effilochaient, le disque solaire commença sa descente sur El Meddad(5), mettant ainsi à couvert les maquisards. Ces derniers ont été disposés pour des tirs croisés de telle manière que les occupants n’auront aucune chance de sortir indemnes de l’embuscade. Dix-sept heures cinquante-cinq, la première voiture, une 403 Peugeot grise, pointa le capot en négociant doucement le virage à gauche. Elle avait à son bord le docteur Bertrand, au volant, un passager, à l’avant. C’était le commandant Audrey, chef du 2e Bureau. Le colonel de Schacken était assis à l’arrière au milieu de deux officiers, dont le colonel Julien, son adjoint.

    Elle est suivie immédiatement par une Peugeot 403 noire conduite par le sous-officier Jean Challiès, un Girondin appelé du contingent, chauffeur du colonel, et, assez éloigné, un Dodge 4x4 qui fermait le convoi. L’assaut fut alors donné après un galvanisant «Allah Ouakbar»(6) hurlé par le chef du groupe. Un déluge de feu s’abat alors sur les deux voitures. Le chauffeur du colonel a été criblé de balles et sa voiture est allée finir sa course en percutant le talus à gauche de la route. Aux premiers coups de feu, le conducteur eut la présence d’esprit d’accélérer à fond dans l’intention d’échapper à l’embuscade, mais le colonel était déjà mort atteint d’une balle au milieu du front. Deux balles ont atteint le colonel Audrey le blessant au bras droit et à la poitrine. L’embuscade n’a duré que quelques minutes. Ecoutons Mohamed Berouka qui, en 1960, une année après sa libération, était allé rendre visite au docteur Bertrand installé à Alger (Hydra).

    «Une année après ma sortie de prison en 1959, je rendis visite au docteur Bertrand qui était mon chef de service à l’hôpital de Théniet El Had. Notre discussion à bâtons rompus nous mena à la fameuse embuscade tendue au convoi du colonel». L’air grave et d’un ton calme, le docteur Bertrand me dit : «Jusqu’à présent, je n’arrive pas à expliquer le fait que seul le colonel ait été atteint d’une balle en plein front, lui qui était assis au milieu. Ma voiture est devenue une vraie passoire. Les portières ont été criblées de balles. Le projectile meurtrier a presque rasé ma tempe pour aller se loger dans la tête de l’officier. Nous sommes sortis indemnes, sauf le colonel, dont la mort a été instantanée et les blessures du commandant Audrey. Ce n’est qu’après cet attentat que je me suis rendu compte que la France n’avait aucun avenir en Algérie. L’indépendance était inéluctable.»

    La nouvelle est tombée tel un couperet à Théniet El Had. La consternation se lisait sur le visage de tous les Européens. Le 14 novembre 1958 sera une date charnière dans la prise de conscience des pieds-noirs et des colons : Demouzon, Peter, Anouille, Formonto, Garcin, Daguenet, Nicole, fervents partisans de l’Algérie française. Un grand doute s’est imposé à eux : l’Algérie sera-t-elle un jour définitivement la leur ?

    Le jour des funérailles, Théniet El Had est devenue une ville morte, enveloppée dans un inquiétant et obstiné silence abyssal que seul le glas de l’église rompait. L’administration coloniale avait interdit tout déplacement de personnes. Les magasins étaient fermés. Accompagnés de leurs maîtres, tous les écoliers ont été rassemblés en face du bal. Après les derniers sacrements, les funérailles eurent lieu devant l’église Sainte Anne des Cèdres. Les généraux Massu, Gracieux, Parlange, les sous-préfets de Miliana, d’Orléansville et de Théniet El Had, Zekouitz, Garcin, maire de la ville, étaient présents, la tête baissée, l’air grave devant les catafalques. Seuls les indigènes contenaient intérieurement leur joie mais aussi difficilement la peur des représailles.

    Il est loin le temps où Hubert Garcin disait à qui voulait l’entendre que le 1er Novembre 54 n’était ni plus ni moins qu’un trouble de l’ordre public, une rébellion que les pouvoirs publics allaient vite mater. Maintenant, il doit impérieusement revoir ses appréciations sur la vérité de l’heure, puisque durant cette année 1958, trois colonels et autant de commandants ont été ciblés par l’ALN. Le colonel Jean-Pierre trouva la mort dans une embuscade à Guelma. Deux autres officiers sont passés de vie à trépas à Médéa et en Kabylie. Maintenant, l’ALN ne se contentait plus que du menu fretin. La Révolution a atteint sa vitesse de croisière. Si la population a accueilli avec soulagement et avec joie la fin d’un tyran, elle appréhendait, la peur au ventre, la terrible vengeance qui allait s’abattre sur elle.

    Par où les militaires allaient-ils commencer ? Va-t-on boucler la ville et prendre dans le tas des «suspects» pour la «corvée de bois» ?Allait-on se rabattre, comme il est d’usage, sur la Chaâba qui, d’ailleurs, a payé un lourd tribut chaque fois que les reîtres débarquaient dans le douar. Mais la vengeance, cette fois-ci, sera in situ, elle allait s’abattre sur le hameau des Boussedi où a eu lieu l’embuscade.

    Les soldats n’épargnèrent personne le jour-même de l’embuscade : hommes, femmes, vieillards. C’est à coups de crosse, de rangers et de cris que les paysans furent bousculés, malmenés et rassemblés dehors, dans une aire de battage. Les reîtres donnèrent libre cours à leur instinct dévastateur. Ils jetèrent pêle-mêle matelas, couvertures, sacs de farine et de blé qu’ils éventrèrent. Les hommes subirent d’atroces tortures. Les enfants étaient terrorisés. Certains seront traumatisés durant toute leur vie.

    Pour la circonstance, la loi sur la responsabilité collective décrétée en 1844 a été décongelée et remise d’actualité. Tirés à la mitrailleuse 30, dix-huit corps tombèrent lourdement sur la terre battue. Tous des Boussedi. Une pluie fine commençait à mouiller les cadavres. Le hameau des Boussedi pleure ses morts. Pour apaiser la conscience de quelques-uns qui auraient pu avoir des scrupules et pour légaliser le génocide, la torture et la disparition, on consignera dans les procès-verbaux que lors de l’enquête effectuée à la suite de l’attentat, des suspects ont fui à la vue des enquêteurs et qu’il leur a été tiré dessus. L’affaire, de ce fait, fut  classée définitivement.
    Renvois :

    1. Régiment de chasseurs d’Afrique 2.  Torture qui consiste à enfermer un prisonnier dans une cellule où règne un silence total. On laisse goutter un robinet que le bruit de la goutte produit à la longue dans les oreilles du supplicié l’effet d’un coup de marteau en plein crâne. 3. Appareil (génératrice) qui produit du courant pour les appareils mobiles de radiophonie. La gégène sera utilisée pour la torture à l’électricité. 4. Commandant militaire de la Wilaya IV 5. La forêt des Cèdres dans la chaîne de l’Ouarsenis. 6.   «Dieu est Grand».

    Mohamed-Rachid Yahiaoui

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  • JUKEBOX17octobre 1961 : nuit sanglante à Paris/youssef girard

    MRAP : Reconnaissance du massacre du 17 octobre 1961 : une première victoire qui en appelle d’autres MRAP : Reconnaissance du massacre du 17 octobre 1961 : une première victoire qui en appelle d’autres jeudi 18 octobre 2012 Plus d’un demi-siècle après les faits, le Président de la République française, François Hollande, a enfin reconnu officiellement la sanglante répression du 17 octobre 1961 : “Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l’indépendance ont été tués lors d’une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes.” Le MRAP, qui depuis plus de 30 ans se bat, avec d’autres organisations, pour la vérité et la justice à propos de ce jour sombre de notre histoire, se réjouit de cette première victoire due à la persévérance de militants, de personnalités, d’associations et appelle à poursuivre la mobilisation. En effet, Le MRAP ne saurait se contenter de la seule reconnaissance des « faits ». Il demande que cette terrible répression soit reconnue comme « crime d’Etat », il demande la liberté d’accès effective aux archives pour tous les historiens, un lieu de mémoire en souvenir des victimes du colonialisme. Le Sénat va étudier mardi prochain, en séance publique, une proposition de résolution du groupe communiste “tendant à la reconnaissance de la répression de la manifestation du 17 octobre 1961” à Paris qui avait fait de nombreuses victimes algériennes. Le MRAP soutient cette proposition qui demande « la réalisation d’un lieu du souvenir à la mémoire des victimes

    17octobre 1961 : nuit sanglante à Paris/youssef girard
    Massacre du 17 octobre 1961 

    Avant la nuit du 17 octobre 1961, la guerre d’Algérie avait déjà touché la France. La tension entre les membres du FLN et la police fut de plus en plus importante. Au sein des « forces de l’ordre colonial », des groupes de policiers se formèrent qui, sur leur temps libres, « ratonnaient », tabassaient et exécutaient des Maghrébins.

    Selon Omar Boudaoud, « la manifestation du 17 octobre 1961 agit comme un révélateur de l’action des pouvoirs de police française à l’égard des Algériens. La répression était permanente depuis novembre 1954. Cependant, les évènements du 17 octobre 1961 ont marqué un tournant dans son histoire et, par là même, dans l’histoire de la guerre de libération »[1]..

    Dans les jours précédents le 17 octobre, du 1ier au 16 octobre 1961, l’Institut médico-légal de Paris recensa 54 cadavres de Maghrébins. Des bruits faisaient état de cadavres, de Maghrébins, retrouvés dans la Seine. A la répression policière, les militants FLN répondaient par les armes. Au total, 22 policiers trouvèrent la mort dans les attaques du FLN de janvier à octobre 1961. La lutte pour l’indépendance de l’Algérie se jouait aussi sur les bords de la Seine.

    Le Général De Gaulle qui considérait que les assassinats de policiers étaient un moyen pour le FLN de faire pression sur la France, ordonna à Maurice Papon, alors préfet de police de Paris[2], d’empêcher, par tous les moyens, les nationalistes Algériens d’agir. De plus, alors que des négociations allaient commencer entre les autorités françaises et le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA), les responsables français considéraient qu’après avoir vaincue le FLN militairement en Algérie, il fallait l’écraser en France afin d’être en position de force lors des négociations.

    Dans ce cadre, Omar Boudaoud, dirigeant de la fédération de France du FLN, fut contacté avant le début des négociations officielles. Les responsables français souhaitaient que la fédération de France du FLN face une déclaration publique décrétant l’arrêt de toutes actions armées en France. Omar Boudaoud répondit catégoriquement « Non » à cette demande car il n’avait pas le pouvoir de le décider[3]. L’ancien cadre de la fédération de France du FLN expliquait : « ce refus fut une des raisons pour lesquelles Michel Debré, chef du gouvernement, son homme de main, le préfet de Paris, Maurice Papon, et leur courant politique choisirent ce moment précis pour tenter de détruire l’organisation du FLN en France »[4].

    Ainsi, le préfet lança une série de mesures, de contrôles divers et variés sur la population maghrébine qui fut de plus en plus harcelée et humiliée par la police. La répression contre le FLN s’intensifiait et l’ensemble des immigrés en subissaient les conséquences selon la logique coloniale de la répression collective. Le 2 octobre, au cours de l’enterrement d’un policier tué dans une attaque du FLN, Maurice Papon affirma : « Pour un coup reçu, nous en porterons dix ».

    Des policiers qui s’étaient indignés des massacres commis lors de la nuit du 17 octobre, témoignaient de cette politique de Maurice Papon visant à exacerber la haine des policiers envers l’ensemble des Algériens : « au cours de plusieurs visites dans les commissariats de Paris et de la banlieue, effectuées de puis le début de ce mois, M. Papon à déclaré : « Réglez vos affaires avec les Algériens vous-mêmes. Quoi qu’il arrive vous êtes couverts ». Dernièrement, il manifesté sa satisfaction de l’activité très particulières des Brigades spéciales de districts et s’est proposé de doubler leurs effectifs. Quant à M. Soreau, il a déclaré de son cote, pour vaincre les scrupules de certains policiers : « Vous n’avez pas besoin de compliquer les choses. Sachez que même s’ils (les Algériens) n’en portent pas sur eux, vous devez penser qu’ils ont toujours des armes »[5].

    Les policiers ajoutaient : « le climat ainsi créé porte ses fruits. La haine appelle la haine. Cet enchaînement monstrueux ne peut qu’accumuler les massacres et entretenir une situation de pogrom permanent »[6].

    Dans ce climat de tension extrême, le 5 octobre, Maurice Papon promulgua, avec l’appui du ministre de l’Intérieur, Roger Frey, un couvre-feu, fixé de 20h30 à 5h30, pour tous les « Français musulmans d’Algérie » de la région parisienne. Ce couvre-feu raciste criminalisait l’ensemble des Algériens et par associations l’ensemble des populations arabes vivants dans la région.

    Le couvre feu touchait particulièrement les militants nationalistes Algériens car, selon Omar Boudaoud, « le travail du FLN s’effectuait généralement le soir : les réunions de militants se tenaient dans les cafés ou dans d’autres endroits, la collecte des cotisations s’effectuaient après la sortie du travail et le repas du soir, de même que la diffusion de la « littérature » FLN ». Devant les difficultés que le couvre-feu entraînerait pour l’organisation nationaliste, le Comité fédéral expliquait que « l’application de ce couvre-feu deviendra un handicap insurmontable et paralysera toute activité. Essayez donc d’organiser quelque chose pour riposter »[7].

    Voulant manifester contre cette mesure discriminatoire et potentiellement dangereuse pour leurs activités politiques, les dirigeants du FLN décidèrent d’organiser une mobilisation sur trois jours. Le premier jour, les hommes, les femmes et les enfants devaient défiler dans les rues de Paris ; le deuxième jour, les femmes devaient manifester pour réclamer la libération de leurs maris ou de leurs enfants, dont l’incarcération la veille était prévisible ; le troisième jour, les ouvriers et les commerçants Algériens devaient observer une grève générale de solidarité avec les manifestants et leurs familles éprouvés[8].

    Le 17 octobre à 20h 30, heure à laquelle débutait le couvre-feu, la première étape de la mobilisation fut mise en œuvre : une grande manifestation non-violente fut organisé à Paris. Malgré l’interdiction de la manifestation par le gouvernement, le FLN appela tous les Algériens de la région parisienne à venir manifester pacifiquement contre cette mesure. Des travailleurs affluèrent de toute la région parisienne pour apporter leur soutient à l’organisation nationaliste. Le service d’ordre du FLN procéda à des fouilles pour vérifier qu’aucune arme ne soit pas infiltrée dans la manifestation.

    La manifestation devait être pacifique et les militants du FLN ne voulaient pas donner de prétexte permettant à la police de justifier une répression. Dirigeant de la fédération de France, Omar Boudaoud expliquait : « nous rappelâmes le caractère impératif de la directive : toute riposte était interdite. Pas question d’avoir le moindre canif »[9]. De même, un groupe de policiers révolté par la répression témoignait du caractère pacifique de cette manifestation en affirmant aucune arme n’avait été trouvée sur les manifestants[10]. Les manifestants étaient environs 30 000.

    En face, 7 000 policiers en uniforme prirent position. Maurice Papon donna l’ordre d’intercepter tous les Algériens et de les empêcher par tous les moyens de participer à la manifestation. Des contrôles furent effectués dans tous les grands points de passage de la capitale. De nombreux Maghrébins furent frappés et emmenés dans des centres de détention. Les forces de l’ordre annoncèrent 11 730 arrestations ; chiffre probablement inférieur à la réalité. Les manifestants arrêtés par la police furent internés dans des lieux réquisitionnés comme le Palais des Sports, le Stade de Coubertin, ou le Centre d’Identification de Vincennes. Ces détentions se prolongèrent durant plusieurs jours, sans la présence de médecins alors que beaucoup avait été molesté par la police. Les témoignages de rescapés et d’appelés firent état de passages à tabac et de décès, dans ces « centres », par défaut de soins.

    Des policiers témoignaient : « parmi les milliers d’Algériens emmenés au parc des Expositions de la porte de Versailles, des dizaines ont été tués à coups de crosse et de manche de pioche par enfoncement du crâne, éclatement de la rate ou du foie, brisure des membres. Leurs corps furent piétinés sous le regard bienveillant de M. Paris, contrôleur général. D’autres eurent les doigts arrachés par les membres du service d’ordre, policiers et gendarmes mobiles, qui s’étaient cyniquement intitulés « comité d’accueil » »[11].

    Près du pont Saint-Michel et du pont de Neuilly, les manifestants se heurtèrent à la police. Des Maghrébins furent frappés et arrêtés par les policiers. Certains furent jetés dans la Seine. Des policiers expliquaient : « à l’une des extrémités du pont de Neuilly, des groupes de gardiens de la paix, à l’autres des CRS, opéraient lentement leur jonction. Tous les Algériens pris dans cet immense piège étaient assommés et précipité systématiquement dans la Seine. Il y en eut une bonne centaine à subir ce traitement. Ces mêmes méthodes furent employées au pont de Saint-Michel »[12].

    Des témoins décrivirent dans de nombreux quartiers de Paris des scènes d’exécution à l’arme à feu, de mutilation à l’arme blanche et d’entassement de cadavres. Des policiers rapportaient : « à la station de métro Austerlitz, le sang coulait à flots, des lambeaux humains jonchaient les marches des escaliers ». Plus tard dans la nuit, la police lança des « ratonnades » dans le bidonville de Nanterre.

    Des policiers firent état d’assassinaTs collectifs dans la cour de la préfecture de police de Paris : « la petite cours, dite d’isolement, qui sépare la caserne de la Cité de l’hôtel préfectoral, était transformée en un véritable charnier. Les tortionnaires jetèrent des dizaines de leurs victimes dans la Seine qui coule à quelques mètres pour soustraire à l’examen des médecins légistes. Non sans les avoirs délestés, au préalable, de leurs montres et de leur argent. M. Papon, préfet de police, et M. Legay, directeur général de la police municipale, assistaient à ces horribles scènes. Dans la grande cours du 19 août plus d’un millier d’Algériens étaient l’objet d’un matraquage intense que la nuit rendait encore plus sanglant »[13].

    Dans le XVIIIème arrondissement de Paris, selon des policiers, « des membres des Brigades spéciales du troisième district se sont livrés à d’horribles tortures. Des Algériens ont été aspergés d’essence et brûlés « par morceaux ». Pendant qu’une partie du corps se consumait, les vandales en arrosaient une autre et l’incendiaient »[14].

    Au cours de la nuit, des faux messages d’information furent diffusés relatant des échanges de coups de feu avec les manifestants et l’annonce de la mort de plusieurs policiers. Ces messages avaient pour but d’attiser la haine des forces de l’ordre à l’encontre des Maghrébins. Cela provoquait un redoublement de violence de la part des policiers surchauffés par ces manipulations.

    Dans la nuit du 17 octobre et dans les jours suivants, la répression s’étendit à la banlieue parisienne. Des policiers témoignaient : « à Saint-Denis, les Algériens ramassés au cours de rafles sont systématiquement brutalisés dans les locaux du commissariat. Le bilan d’une nuit récente fut particulièrement meurtrier. Plus de trente malheureux furent jetés, inanimés, dans le canal après avoir été sauvagement battus. […] A Saint-Denis, à Aubervilliers, et dans quelques arrondissements de Paris, des commandos formés d’agents des Brigades spéciales des districts et de gardiens de la paix en civil « travaillent à leur compte », hors service. Ils se répartissent en deux groupes. Pendant que les premiers arrête les Algériens, se saisit de leurs papiers et les détruits, le second groupe les interpelle une seconde fois. Comme les Algériens n’ont plus de papiers à présenter, le prétexte est trouvé pour les assommer et les jeter dans le canal, les abandonner blessés, voire morts, dans des terrains vagues, les pendre dans les bois de Vincennes »[15].

    Au total, plus de 300 Maghrébins tombèrent sous les coups de la police française dirigée par Maurice Papon qui bénéficiait du soutient du Général De Gaulle et du premier ministre Michel Debré. Les 31 octobre 1961, des policiers constataient que « les corps des victimes » commençaient « à remonter à la surface journellement » et portaient « des traces de coups et de strangulations »[16]. D’autres Algériens furent arrêtés et transférés dans les camps d’Algérie par un pont aérien établi à partir du 20 octobre.

    Dirigeant de la fédération de France du FLN, Omar Boudaoud expliquait : « nous nous attendions certes à une vague de répression ; mais nous étions tellement sûrs du caractère pacifique de la manifestation, que la sauvagerie et l’atrocité de la répression qui s’en suivit nous prit au dépourvu »[17].

    Quelques jours après les faits, le 30 octobre 1961, Eugène Claudius-Petit, député centriste, dénonça les responsabilités de la Préfecture de police, à l’Assemblée nationale : « Il faut appeler les choses par leur nom. Chaque gardien de la paix ne pouvait plus se déterminer, à cause de l’ordre reçu et de la décision prise, autrement qu’en tenant compte de la couleur de la peau, de la qualité des vêtements ou du quartier habité. Heureux les Kabyles blonds qui ont pu échapper aux réseaux de la police ! Faudra-t-il donc voir prochainement, car c’est la pente fatale, la honte du croissant jaune après avoir connu celle de l’étoile jaune ? ».

    Le 31 octobre 1961, des policiers qui avaient décrit les atrocités commises durant la nuit sanglante dans une déclaration, précisaient que les violences décrites n’étaient « qu’une faible partie de ce qui s’est passé ces derniers jours, de ce qui se passe encore. Ils sont connus dans la police municipale. Les exactions des harkis, des Brigades spéciales des districts, de la Brigade des agressions et violences ne sont plus des secrets »[18].

    Mettant en cause les plus hautes autorités de l’Etat français dans le massacre du 17 octobre, les mêmes policiers affirmaient : « nous ne pouvons croire que cela se produisent sous la seule autorité de M. le préfet. Le ministre de l’Intérieur, le chef de l’Etat lui-même ne peuvent les ignorer, au moins dans leur ampleur »[19]. Toutefois, ni les donneurs d’ordre, ni les exécutants ne furent inquiétés après le massacre. Les crimes du 17 octobre 1961 restent toujours impunis.

    Malgré la terrible répression la manifestation du 17 octobre 1961 était un fait important pour le FLN qui montrait le soutient que lui portait, l’immigration algérienne et la forte conscience politique de celle-ci[20]. Selon Omar Boudaoud, « la marche pacifique organisée au mépris du couvre-feu avait tourné à la démonstration de force du FLN, soutenue par l’immense majorité de la communauté algérienne »[21]. De plus, il ajoutait : « l’opinion publique française en général réagit assez positivement. Elle n’a pas vilipendé les manifestants et les Français témoins du carnage n’ont pas hésité à porter secours aux blessés et aux mourants. […] les Français ayant assisté à la manifestation, surtout les démocrates, témoignèrent d’une répression aveugle et démesurée »[22].

    Enfin, il expliquait que la manifestation eut un fort impact au niveau international : « à cette époque la droite « Algérie française » présentait le FLN comme un ramassis de rebelles terrorisant leurs frères. Or, on s’est trouvé ici face à une démonstration organisée, drainant hommes, femmes et enfants appartenant à toutes les catégories de la communauté algérienne de Paris. Dans le sillage des manifestations de décembre 1960 à Alger, c’était là une nouvelle expression massive de soutien au GPRA. Ce fut l’entrée manifeste de la communauté émigrée dans l’action sous l’égide du FLN, et le plébiscité du GPRA, à nouveau légitimé pour négocier avec le gouvernement français »[23].

    Après cette terrible nuit, l’Etat français s’employa à recouvrir les massacres du 17 octobre 1961 du voile de l’amnésie. La création d’une commission d’enquête parlementaire fut systématiquement bloquée, la publication de plusieurs livres interdite, les bandes d’un documentaire furent saisies par la police. Pendant des années, la radio et la télévision, contrôlées par l’État, n’abordèrent pas le sujet qui était totalement tabou. Mais si la droite française a soutenu ces violences, la gauche a également participé à cet oubli. Elle mis en avant, de manière exclusive, les évènements du métro Charonne, le 8 février 1962, dans lesquelles ces militants furent les premières victimes, éludant ainsi les massacres du 17 octobre 1961. Les victimes de Charonne, ni musulmans, ni Algériens, mais Français pour la plupart communistes et syndiqués, seront enterrés par près d’un demi-million de personnes et célébré comme martyre de la lutte contre le fascisme.

    Après cette amnésie organisée, la mémoire du 17 octobre 1961, comme celle de l’ensemble de l’histoire de la colonisation, remonte à la surface dans un pays qui n’a pas mis un terme à son « aventure coloniale » après la décolonisation. Cette évocation des morts et des massacres, loin d’être un refuge dans un passé macabre, est avant tout le signe d’une renaissance collective d’un groupe humain marginalisé et dominé.

    17octobre 1961 : nuit sanglante à Paris/youssef girard 17octobre 1961 : nuit sanglante à Paris/youssef girard 
    [1] Boudaoud Omar, Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, Alger, Casbah Editions, 2007, page 184

    [2] Maurice Papon fut préfet de Constantine de 1956 à 1958.

    [3] Boudaoud Omar, Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 184-185

    [4] Ibid., page 185 

    [5] Cité par Omar Boudaoud in. Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 260 

    [6] Ibid.

    [7] Boudaoud Omar, Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 185 

    [8] Ibid., page 185-186 

    [9] Ibid., page 186 

    [10] Cité par Omar Boudaoud in. Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 258 

    [11] Ibid. 

    [12] Ibid.

    [13] Ibid., page 258-259

    [14] Ibid., page 259 

    [15] Ibid., page 259 

    [16] Ibid., page 258 

    [17] Boudaoud Omar, Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 185 

    [18] Cité par Omar Boudaoud in. Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 259 

    [19] Ibid., page 260

    [20] Cela s’inscrit en faut avec une « légende » qui voudrait que les premières générations d’immigrés Maghrébins aient passé leur vie à « baisser la tête ». Ce n’est pas parce que leurs mobilisations sont peu connu, et souvent savamment relégué aux oubliettes de l’histoire, qu’elles sont inexistantes.

    [21] Boudaoud Omar, Du PPA au FLN mémoire d’un combattant, op. cit., page 186

    [22] Ibid., page 187

    [23] Ibid., page 188 

    Youcef girard in oumma.com

     

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